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Louise Labé

Écrit par Charline Fauveau

Création Sonore Laurent Sellier
Voix Marianne Schlégel

«Nostre chere et bien aymée Louïze Labé, Lionnoize», le Roi de France t’a accordé le Privilège d’imprimer tes écrits. Tu t’es affranchie de l’éditeur en sollicitant, en ton nom, cette autorisation exclusive. Avant toi, seule une reine eut cette audace. Non hasardeusement, tu as baptisé ta publication Euvres, t’inscrivant dès lors dans la lignée des pionnières et pionniers à s’octroyer cette distinction.
 
1555, la postérité en tête, tu délestes ta signature de «Dame» et y accoles «Lionnoize». Louise, simple bourgeoise, tu romps avec la tradition et te propulses, avec précaution, au rang des plus grands poètes. Ils te soutiennent et te louent, en vingt-quatre poèmes, qui sont autant d’atouts, contre le blâme habituel fait à celles qui délient leurs mots.
 
Quand ta plume est au repos, tu rivalises avec tes compères en maîtresse d’armes. Virile cavalière, tu es si douée à l’escrime que parmi l’armée, à « un Achille ou un Hector » tu es comparée. Or à la lutte, le luth tu préfères. Louise, la belle âme de musicienne, ton ingéniosité fait d’ « Apolon », ton divin compagnon. Avec des brins de philosophie et de mythologie, tu tisses un ouvrage en vers, le récit d’une femme qui livre ses désirs à cœur ouvert. Et, sans une once de culpabilité, tu incites tes sœurs à délaisser leurs somptueux habits pour se parer de l’honneur et de la gloire que les sciences prodiguent.
 
En modèle d’émancipation, La Belle a soy brise une nouvelle fois les conventions : Labé n’est ni ton nom de jeune fille – Charlin – ni ton nom d’épouse – Perrin. Tu as choisi le surnom d’artisan de ton père cordier qui, en latin – labia – signifie “les lèvres”. Un paronyme qui illustre bien ta poésie du baiser. En riposte, les médisants jouissent à perdre ta réputation. Pour les uns, tu incarnes la voix de l’écriture au féminin, pour les autres tu es la muse des putains.
 
Dans ton testament, tu lègues ton héritage si généreusement que je ne peux citer toutes celles et ceux à qui tes biens ont profité.
 
Mais même mise en bière, Louise, la jalousie tu attises. Cinq siècle après ta naissance, une hypothèse tente de renverser l’icône de la Renaissance : Louise Labé, l’autrice, n’aurait jamais existé. Sous ton labeur, des universitaires placent le nom d’auteurs qui se seraient amusés à duper les lecteurs. Ont-ils rusé pour soustraire au Roi un faux Privilège ? Pourquoi tenter de réduire la Belle Cordière à une créature de papier ?
 
Louise, tu avais deviné que ta maternité littéraire serait remise en question. Mais ta renommée au sein de notre Matrimoine « ne pourra estre oté, ni par finesse de larron, ni force d’ennemis, ni longueur de tems ».
 

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